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L’argent des Comptes personnels formation (CPF) des Français intéresse les escrocs, mais aussi des prestataires peu scrupuleux. On peut éviter les pièges.

 

Si vous êtes salarié(e) en activité, que vous soyez au début, au milieu ou même à la fin de votre carrière, vous avez forcément reçu SMS ou appels téléphoniques vous incitant à débloquer les crédits de votre CPF en optant pour une formation.

Malheureusement, il y a fort à parier que ces interlocuteurs s’intéressent beaucoup moins à votre avenir professionnel qu’à l’argent que celui-ci génère !

Le Compte personnel formation (CPF) a remplacé, depuis 2015, le Droit individuel à la formation (Dif). Au-delà des sigles, il y a une différence de taille entre l’ancien et le nouveau dispositif : le Dif était un crédit d’heures, tandis que le CPF monétise les droits.

Toute personne âgée d’au moins 16 ans exerçant une activité professionnelle dispose d’un CPF, sur lequel figure un crédit (renouvelable) permettant de souscrire à une ou plusieurs formations.

 

Plus de 2 millions de formations financées en 2021.

 

Les CPF des travailleurs de France sont alimentés par l’effort de leurs entreprises. Cet argent n’est pas disponible pour un autre usage, et n’est transférable qu’à un organisme formateur. Mais la somme, plafonnée à 5.000 euros, existe bel et bien. Elle est placée sur ce CPF, compte nominatif géré par la Caisse des dépôts et consignations (CDC).

Avec plus de deux millions de formations financées en 2021 par ce dispositif, on assiste à un développement significatif du nombre d’actions de formation, qui donnent de la vigueur au marché de l’emploi. Mais la médaille a un revers : cet argent, plus de quatre milliards d’euros au total, intéresse des escrocs, mais aussi des acteurs de la formation peu scrupuleux.

À l’instar des dispositifs d’aide à la rénovation énergétique naguère, des margoulins s’abritent derrière l’action des services publics pour tendre des pièges. À la CDC, on recense environ 15.000 comptes piratés depuis 2019, ayant donné lieu à une fraude d’un total de plus de 16 millions d’euros. Mais on ne parle là que de l’escroquerie pure, qui consiste à inscrire un interlocuteur à son insu sur une formation « prétexte » qui n’existe pas, dans l’unique but de siphonner le crédit du CPF.

La « zone grise » est plus redoutable encore : de vrais prestataires mandatent des « réseaux partenaires », lesquels rabattent par téléphone des candidats pour des formations réelles, mais dont le contenu est discutable et surtout, dont le prix est artificiellement gonflé.

C’est typiquement l’affaire qu’a eue à examiner, au mois de juin, le tribunal correctionnel de Saint-Omer, dans le Pas-de-Calais. À la barre, poursuivie pour « abus de biens sociaux, blanchiment, faux et usage de faux », la gérante d’un organisme de formation, ancienne salariée du secteur qui avait créé sa structure début 2020.

Un kit à 200 euros facturé…

 

2.000Pour exister pendant l’épidémie de Covid, elle avait acheté des kits de formation (en format PDF) à des organismes spécialisés. Chaque kit individuel était transféré sur une clé USB, l’ensemble envoyé par la poste au stagiaire. Le kit était facturé 193 euros à la gérante, qui ajoutait 7 euros par clé USB. Soit 200 euros… facturé 2.000 euros sur le CPF du stagiaire ! Au total, près de 1.600 victimes, et 3 millions d’euros encaissés, directement issus du CPF.

Tracfin, l’agence de renseignement du ministère de l’Économie, s’intéressait alors aux résultats mirobolants de cette entreprise individuelle. D’énormes bénéfices, en partie réinvestis dans l’achat de tablettes, téléphones et autre cartes-cadeaux offerts aux stagiaires à l’issue de leur formation. De quoi bâtir la bonne réputation d’un organisme dont des directeurs des ressources humaines d’entreprises de la région n’avaient pas hésité à recommander les services auprès de leurs propres salariés !

L’affaire a été mise en délibéré au 20 septembre. Le procureur a requis contre la gérante 300.000 euros d’amende, et trente mois de prison, dont six ferme.

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